Feu de joie
Pierre Petit
Presse de la cité ISBN 978-2-258-19433-5
Nous savons tous ce qu’un incendie peu représenter lorsqu’il se déclenche sous la chaleur de l’été au cœur d’un paysage de pinède, d’herbes sèches ainsi que tout ce qui peut l’alimenter. Si nous ne l’avons pas tous fréquenté, les images diffusées sur nos petits écrans ne peuvent nous avoir échappé. Le feu est un élément particulièrement insidieux, violent dans ses instants de rage et pire encore lorsque le vent se joint à la cavalcade. Le feu n’est pas dépourvu de malice, il possède l’instinct de l’affamé capable de détecter son alimentation là ou personne n’y aurait songé. Il n’est donc pas anodin d’avoir associé les flammes aux tourments de l’enfer, les pompiers vous le confirmeront, le combattre revient à se dresser face à un animal enragé.

Pierre Petit nous invite à le suivre au cœur de la France profonde, dans un petit paradis luxuriant bordé par un ruisseau dans lequel foisonnent des écrevisses ne demandant qu’à se faire prendre pour le plaisir d’un couple d’amoureux. L’histoire débute en ce jour attendu, le seul de l’année, ou la pêche de ces petites merveilles est autorisée sous réserve de respecter les règles en la matière.
Cependant, si l’on parle d’amour il n’est pas rare que la concurrence se dévoile sachant qu’au bout de la joute, tombera le choix de la demoiselle pour le déplaisir du soupirant déchut. L’amour peut se montrer cruel même si la volonté de nuire ne fait pas partie des intentions de l’héroïne de ce roman. Blessure d’orgueil ou blessure de cœur, la frontière est ténue, un cœur qui saigne peut réagir violemment, dépasser quelquefois les intentions pour en arriver à commettre l’irréparable malgré l’absence de préméditation. C’est que blessure d’amour est une souffrance insupportable.
Un couple aimant, le bruit d’un moteur déchirant la tranquillité ensuite ? Le feu s’invite en raison d’un acte stupide enfin, on pourrait le songer…
Voici approximativement 400 pages qui vous accrocheront les yeux. Impossible de se défaire d’une histoire rondement menée, une aventure qui nous aspire à vous couper le souffle, car, du souffle vous sera nécessaire afin de marcher aux côtés des pompiers chargés de combattre un fléau pouvant s’avérer mortel.
Les hommes du feu sont prêts à tout donner pour arriver à bout de la folie des flemmes. Ils se relayent jusqu’à dépasser l’épuisement, entourés parfois par quelques bénévoles et tout ce monde malgré le manque de moyen, à force d’intelligence de désespoir parfois, nous plonge dans un roman méritant par la qualité de sa narration. Soulignons-le, malgré un sujet qui aurait pu s’avérer monotone ici, il n’y a pas de longueur, pas de fadeur bien au contraire, le plaisir de lire se tourne avec les pages, sans discontinuer, jamais, pas un seul instant. C’est que Pierre Petit sait comment s’y prendre pour nous tourner la tête nous invitant parfois à suivre l’héroïsme, l’étrangeté d’une femme esseulée au cœur d’un village abandonné qui n’a pour toute compagnie qu’un bouc et quelques chèvres et cependant, au cœur de la fournaise nous offre l’envie de sourire face à cette incongruité.
Feu de joie est une histoire d’amour, une romance dépourvue du collant de la guimauve. Ici résonne l’aventure dans laquelle quelques raccourcis d’auteur ne dérangent nullement notre passion de lecture.
Pierre Petit nous a habitués à le suivre sur les routes du suspens, de ces endroits profilés en mode cinéma noir et blanc, vous savez, ces films qui nous portaient vers la félicité en raison de la qualité des images, du jeu d’acteur qui dépasse la définition de l’art ainsi que toutes ces ombres que l’on plaçait avec intelligence faisant croire que tout était facile à faire alors qu’en réalité !…
Philippe De Riemaecker
